dimanche 27 février 2011

Lettre a mes amis tunisiens

Depuis quelques jours des manifestations ont lieu, de plus en plus violentes, sur la Place du Gouvernement à la Kasbah de Tunis pour demander le départ du gouvernement de transition de Ganouchi. Ces manifestations auraient fait, hier, trois morts.
On assiste à une impatience et a une effervescence dans la société qui ne comprend plus ce qui se passe et qui craint de se voir « confisquer » sa révolution.
Dans le même ordre d’idée se met en place, laborieusement, et de manières assez conflictuelles, un Conseil de Protection de la Révolution.
Ces initiatives sont elles sages ? On peut les comprendre et dans toute révolution on passe, en effet, par des mouvements divers, désordonnés, quelques fois contradictoires et bien souvent « contre productif »
Tout cela est sans doute difficile à éviter, mais je voudrais inviter, mes amis tunisiens à réfléchir et à continuer  de donner, au monde entier, une image de détermination mais aussi de sagesse.
S’ils veulent, ce que je crois, l’installation en Tunisie d’une démocratie libre et apaisée ou chacun pourra s’exprimer librement et participer, par son vote, à la gestion du pays, il faut alors, de manière impérative qu’ils commencent d’ores et déjà, à soutenir que rien, aucune réforme ne pourra se faire en dehors de l’élection.
Il y a donc un moment difficile qui est celui que l’on vit actuellement ou le gouvernement en place n’a pas de légitimité politique et le moment ou sortira des urnes un gouvernement qui aura la légitimé du vote. Il y a donc, et tous les tunisiens doivent le comprendre, une période transitoire nécessaire à la mise en place d’élections libres.
Comment doivent-ils, à mon sens vivre et gérer cette période ?
Je ne crois pas que ce soit en multipliant les organismes sans légitimité comme le serait le Conseil de Protection de la Révolution. Qui a, aujourd’hui la légitimé de le constituer et d’y figurer ? Quel pouvoir, non consacré par l’élection, pourrait avoir ce Conseil ? Serait-il au dessus du gouvernement de transition, des Commissions installées, de l’armée, de la police ?
On voit bien que poser ces questions c’est de toute évidence y répondre. La Conseil n’aurait aucune espèces de légitimité et s’il s’octroyait les pouvoirs que je viens d’évoquer, l’on serait ni plus ni moins dans une démarche dictatoriale.
Le gouvernement de transition, je le disais, n’a de toute évidence plus de légitimité politique mais il a une « légitimité de papier » c'est-à-dire qu’il respecte la Constitution du pays. Ce n’est pas rien et les Tunisiens dont j’ai rappelé le souhait d’une démocratie apaisée doivent, me semble t-il, commencer par respecter le droit existant, même si c’est pour très vite le changer.
De même que le Conseil de protection de la révolution n’a aucune légitimité puisqu’il s’autoproclame, de même les manifestants, même nombreux, ne sont pas en état de donner une légitimité à un pouvoir quelconque.
Alors ?
Et bien je crois que la sagesse voudrait que l’on donne au gouvernement de transition le temps (quelques mois) de préparer dans la sérénité des élections libres qui désigneront des élus qui, eux auront la légitimité du vote et qui pourront conduire les grandes réformes nécessaires et souhaités par le peuple. Quelques mois de patience. Ce n’est pas trop demandé pour un objectif si capital !
Pour répondre à ceux, nombreux, qui craignent que ce gouvernement provisoire qui n’a, je le répété, pas de légitimité politique, ne leur confisque leur révolution, je dirai simplement que le peuple qui a réussi l’impensable : mettre un terme à des décennies de dictature policière, sera parfaitement capable et chacun le sait,le gouvernement le premier, de recommencer si ce gouvernement provisoire s’avisait de le tromper.
Rien n’empêche aussi de maintenir ce Conseil de protection de la révolution mais en étant conscient qu’il n’a aucun pouvoir juridique mais qu’il est seulement et ce n’est pas rien un contre pouvoir (comme un parti, une association ou un syndicat) veillant sur ce qui se passe et alertant le peuple en cas de difficulté.
Voilà, je crois le chemin de la sagesse .
Mais il faudrait, aussi, pour que ce chemin se déroule dans de bonnes conditions trois éléments essentiels :
-une presse toujours libre, informée ,honnête et vigilante.
-des partis politiques qui se structurent rapidement, qui donnent clairement, sans langue de bois, leur programme (sur les institutions qu’ils souhaitent, sur les valeurs qu’ils défendront, sur les mesures économiques et sociales qu’ils porteront.)
-Enfin il faudrait que le gouvernement provisoire prenne rapidement conscience que le peuple souhaite être pleinement informé de l’évolution des questions et communique, dés lors, davantage et clairement.

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